Miltos Sakhtouris (ou Sachtouris) (1919-2005) est considéré comme l’un des poètes les plus importants et les plus originaux de l’après-guerre. Issu de la mouvance surréaliste, comme bien des jeunes poètes grecs de l’époque, Sakhtouris trouvera très tôt son style personnel, « lyrique et dramatique », dans ses propres mots, au delà du surréalisme. Les vécus traumatisants de la guerre et de l’après guerre pèsent de façon déterminante sur sa poésie, envahie par les images violentes et absurdes qui installent un climat de cauchemar.
Il n’a jamais voyagé, n’a jamais eu de métier. Son seul travail, sa seule aventure a été la poésie. (Source)
1938-1945 | La maladie, la guerre et la mort en tant que premières sources d’inspiration
Né à Athènes le 29 juillet 1919, fils unique du conseiller juridique et judiciaire Dimitris Sakhtouris et d’Ageliki Papadima, Miltos Shaktouris commence des études de Droit en 1937 suite au désir de son père. Il apparait aux lettres en aout 1938 en publiant la nouvelle Ο Άτυχος (Le malchanceux) dans la revue La semaine (Source : Katerina Panagiotopoulou, Revue Mandragoras, numéro 60, avril 2019). En janvier 1941 il publie sous le nom Miltos Chrysanthis une nouvelle dans la revue « Littérature néohellénique » et en 1941, sous le même nom, il publie par ses propres moyens son premier recueil poétique H μουσική των νησιών μου (La musique de mes îles). Plus tard, Sakhtouris renoncera à cette collection et brûlera toutes ses copies en allumant un feu dans le jardin de sa maison. (Source : Mandragoras, avril 2019).
La mort soudaine de son père en 1939, la maladie mentale de sa mère peu après, son service militaire pendant la guerre, ainsi que sa maladie de tuberculose, ont tous eu un effet dévastateur sur le psychisme du jeune Sakhtouris. En 1941, il quitte définitivement ses études de Droit et décide de consacrer toute sa vie à la poésie.
Comme il écrit au sujet de la maladie: « Kafka déplace la maladie hors du corps. Il la considère comme une maladie de nerfs, une tragédie de l’esprit, alors que pour moi au début c’était un état d’euphorie intérieure pour laquelle j’ai écrit La fièvre de la joie (Ο πυρετός της χαράς) et autres poèmes. Beaucoup plus tard, j’ai vécu le drame de la maladie, j’ai réalisé le poids que cela avait sur moi. J’ai même réalisé que peut-être sans elle, je ne serais pas un poète, au moins tel que je suis… » (Source : Mandragoras, avril 2019).
Pendant l’occupation de la Grèce par les forces de l’Axe (1941-1944) il rencontre les poètes Odysseas Elytis et Nikos Engonopoulos. En 1945, Ikaros publie son recueil de poèmes intitulé Η Λησμονημένη (L’Oubliée).
Peintures de Yianna Persakis, la compagnon de Miltos Sachtouris.
1950-1980 | L’empreinte distinct de sa poésie
Le milieu des années ’50 marque une nouvelle ère pour le poète: la mort de sa mère en 1955 coincide avec son effondrement financier. Peu après, en 1957, il fait la connaissance de la peintre Yianna Persakis (1921-2008), qui deviendra sa compagnon de vie, sans pour autant cohabiter avec elle. En 1986, son recueil Ektoplasmata, marque sa rupture avec le surréalisme et en 1987 il remporte le premier Prix d’Etat de poésie. Outre la poésie, il travaille également sur la traduction des œuvres de Kafka, qu’il admire indéfiniment et à qui il dédie des poèmes. « J’ai beaucoup aimé Kafka, je le sentais profondément », écrit-il.
Cavafy, Rilke, Beaudelaire, Apollinaire, Embirikos, Engonopoulos sont aussi parmi ses principales influences, comme Sakhtouris lui-même dit dans une interview dans le journal To Vima en 1995.
Dans une interview télévisée, Sakhtouris affirme que « la vie des poètes est toujours difficile, parce qu’ils vivent dans la région du rêve « ce qui les rend dérangés et incapables de faire face à la réalité. » Dans une autre interview (années ’80) il déclare : « Le poète est inutile. C’est un peu un luxe. Il aide seulement des personnes sensibles à surmonter les difficultés de cette vie. »
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