Nikos Paraskevopoulos, professeur de Droit Pénal à la Faculté de Droit de l’Université d’Aristote de Thessalonique, est Ministre de la Justice, de la Transparence et des Droits de l’homme, auprès du gouvernement actuel du PM, Alexis Tsipras. Nikos Paraskevopoulos a longtemps été engagé dans la défense des droits de l’homme et des prisonniers. Il a publié plusieurs livres sur le droit pénal et son histoire, ainsi que de nombreux articles parus dans les quotidiens grecs.
– Quelles sont les priorités de votre Ministère?
– Commençons par quelques constats fondamentaux. C’est bien connu que les Tribunaux grecs retardent de se prononcer, ce qui rend le fonctionnement de la justice problematique. Εn même temps, il existe un problème de surpopulation carcerale. Je pourrais donc dire que nos priorités se tournent principalement autour de ces deux sujets pour dépasser les retards du système judiciaire et assurer la réinsertion sociale. Il ne fait aucun doute que des projets de reforme doublés de grands mots sur ces sujets ont déjà existé au passé mais les resultats restent decevants et la situation globale ne cesse de se déteriorer. Il nous appartient donc de mettre en place des projets novateurs, dotés des caractéristiques différentes des projets précédents.
Des solutions simples n’existent pas, bien évidemment. Les problèmes systémiques nécessitent des solutions systémiques. Je pourrais seulement, à titre indicatif, énumérer quelques domaines qui doivent attirer notre attention: en ce qui concerne les rythmes de la justice pour les décisions des Tribunaux, il est nécessaire de procéder à l’augmentation du nombre des juges et du personnel judiciaire.
Quant au système penitentiaire, il est nécessaire de mettre en place des structures d’insertion tant pour l’ensemble des détenus que plus pariculièrement pour les catégories spéciales les plus vulnérables, telles que les mineurs, les patients, les handicapés et les toxicomanes. Cette priorité se nourrit de la perception que la réinsertion ou le traitement de la désintoxication de drogues sont des mesures beaucoup plus efficaces pour combattre la criminalité secondaire que l’internement lui-même.
– Le Parlement grec a récemment voté une loi sur la réduction du nombre des détenus dans les prisons grecques. Quels sont les points-clès de cette loi?
– Ιl s’agit de la loi 4322/2015 qui inaugure des prévisions de mise en liberté des détenus, même dans des cas ou des peines très lourdes ont été infligées. On parle d’un sujet sensible dans la mesure où la grande majorité des détenus dans les prisons grecques subit des peines de longue date. Force est pourtant de constater que les mises en liberté prévues ont été conçues avec prudence afin de préserver la proportionnalité entre «responsabilité-peine», tout en rendant en compte les conditions sous lesquelles quelqu’un purge sa peine, ainsi que les traits de la personnalité propres à chaque détenu.
Μention particulière doit être aussi faite aux prévisions qui limitent l’ incarcération des mineurs dans les établissements pénitentiaires ainsi qu’ à celles-ci qui facilitent l’ application des mesures alternatives de désintoxication à l’ instar des peines classiques. Enfin, il est aussi à noter la suppression d’un système de sécurité qui mettait l’accent sur une sécurité accrue dans un seul établissement, système ayant des inconvénients probables (surpopulation des détenus avec des conditions de détention inappropriées). Le système de sécurité «dispersé» qui introduit la nouvelle loi rend le système de détention plus efficace, plus sûr, voire plus humain.
– Vous avez mis à l’ordre du jour le pacte civil de même sexe. Quels sont les motifs de cette décision?
– La possibilité d’établir un pacte civil, indépendemment du sexe, met en œuvre l’engagement de la société grecque et de l’Etat grec pour le respect de la diversité et l’abolition progressive des discriminations de toute sorte. Dans cette perspective on se dirige en partant des valeurs qui constituent des principaux piliers de la culture juridique grecque et européenne. Ce faisant, l’Etat grec donne aux citoyens la possibilité de déterminer librement les aspects de leur vie privée, sans contraintes extérieures, mais dans un cadre cependant des garanties, de protection et de coexistence sociale harmonieuse. En ce qui concerne l’introduction de la possibilité d’un mariage ou d’une adoption par un couple de même sexe, le sujet sera examiné par un comite législatif spécial dans le cadre général de la révision du droit de la famille.
Entretien accordé à Costas Mavroïdis et à Lazaros Kozaris