La première arrivée à Athènes peut parfois s’avérer déroutante. Elle ne peut en tout cas pas laisser indifférent. L’œil non-avisé est surpris par la diversité architecturale de la capitale grecque, on lui reproche un manque d’harmonie et d’équilibre, avant de se laisser, guidé par l’histoire et la curiosité, charmer par les surprises que l’Athènes moderne réserve à ses amoureux. Grèce Hebdo se plonge au cœur du quartier de Kypseli, témoin privilégié des évolutions architecturales, sociales et culturelles de la ville.
 
La rue Fokionos Negri dans le tissu urbain de Kypseli.
 
Comme la plupart des quartiers de la capitale, Kypseli n’est encore qu’un bourg quasi désert au début du XIXème siècle où les installations agricoles entourent quelques rares villas qui parsèment le quartier. Mais l’exode rural galopant et l’arrivée de nouveaux habitants à l’aube de la deuxième guerre mondiale vont donner au quartier ses dimensions actuelles. Cette époque est marquée par  la construction de nombreuses maisons individuelles et par la transformation de la petite rivière Levidi en rue boisée, portant depuis le nom de rue Fokionos Negri et toujours très appréciée des habitants de Kypseli pour ses jardins et ses restaurants qui la jalonnent.
 
Kypseli en 1835
Kypseli en 1835. 
 
Cette rue va faire la renommée d’un quartier en pleine gloire au début des années 70. En effet, après la vague de constructions qui marqua les années 60 et 70 dans la capitale grecque, Kypseli prend son visage définitif  et s’impose alors commeun choix idéal pour vivre à Athènes. Les membres de la bourgeoisie et de l’intelligentzia athénienne rejoignent les autochtones et les nouveaux venus de l’exode rural pour jouir de l’effervescence et la proximité du quartier avec le centre-ville. Dans son sillage, de nombreux artistes viennent peupler le quartier et assurer la réputation d’un endroit où il fait bon vivre.
 
Mais le poids du temps et le développement de nouveaux quartiers au sud-est de la ville vont avoir raison de ces années de gloire. Les plus jeunes habitants commencent à quitter le quartier à l’aube des années 90 le jugeant trop bruyant, pollué et surpeuplé. Dans le même temps, Kypseli commence à se peupler d’étrangers qui s’installent principalement dans les appartements en sous-sol et au rez-de-chaussée. Ces différents changements vont donner au quartier un tout autre visage, le visage multiculturel qu’on lui connaît aujourd’hui.
 
Collage Fokion Negris
A gauche: Fokion Negris (1846-1928). A droite: La rue Fokionos Negri en 1964.
 
D’aucuns diront que Kypseli a perdu de son charme et que les belles années sont désormais belles et bien passées comme d’autres diront à l’inverse que le quartier n’en finit plus de se réinventer et que la volonté des habitants d’en faire un agréable lieu de vie demeure.
 
Le mieux reste encore d’aller découvrir par soi-même. De par son ancienneté et ses résidents issus des classes moyennes et bourgeoises du siècle dernier, Kypseli a été l’un des lieux privilégiés des architectes pour réaliser leurs projets au grès des courants architecturaux alors en vogue. Marcher dans les rues du quartier permet d’admirer, au milieu des immeubles construits à la va-vite dans les années 70, une multitude de bâtiments à l’architecture détonante, allant du style Art Nouveau au Néo-classique mais également Art Déco.
 
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Bâtiment Lanara (rue Fokionos Negri et Eptanissou).
 
Les bâtiments encore visibles aujourd’hui ont pour les plus anciens été construits au début des années 30, voire fin des années 20 pour quelques-uns. Ce souci du beau et du moderne a perduré jusque quelques années après la seconde guerre mondiale avant de décliner face à la nécessité de bâtir vite pour loger les nouveaux habitants. La rue Fokionos Negri que nous évoquions plus haut a conservé une dizaine de bâtiments datant de l’entre-deux-guerres. Les plus remarquables sont visibles au numéro 9 de la rue et au numéro 23, où en 1938 a été édifié pour la famille Lanaras un immeuble de style Art Déco  par les soins de l’architecte Ioannis Zolotas. Le style Art Déco, né au cours des années 10, en réaction à l’Art Nouveau prône un retour à la rigueur classique.
Kypseli rueEptanissou
Kypseli, rue Eptanissou. 
 
Quelques rues plus loin, dans la rue Kykladon, se dresse justement des immeubles de style Art Nouveau aux lignes courbes. L’un des bâtiments les plus représentatifs du style est visible le long de l’avenue Patision au numéro 150. Cette demeure a été le lieu de résidence du dictateur Ioannis Metaxas durant quelques années.
 
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La maison de Ioannis Metaxas (rue Patission 150 et Fokionos Negri).
 
Dans l’ensemble les bâtisses sont bien entretenus et ont conservé leur élégance d’antan, mais ce n’est pas le cas de tous les bâtiments remarquables datant de l’avant-guerre. Nombre d’entre eux, laissés à l’abandon, menacent de disparaître. L’association Monumenta qui lutte pour la préservation de l’héritage naturel et architectural en Grèce et à Chypre tente de sensibiliser les habitants et le monde politique à la question.  Ses membres ont répertorié de nombreux bâtiments laissés à l’abandon à Athènes et dans toute la Grèce afin d’alerter sur leur état. Au numéro 18 de la rue Androu à Kypseli, nous trouvons l’un d’entre eux. Désormais abandonné, l’édifice est un modèle de l’architecture néo-classique.
 
Texte écrit par  Corentin Laporte | GreceHebdo.gr
 
 
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M.V.         
 

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