Petros Koulmasis, né à Dresde en 1914 des parents grecs a été journaliste, écrivain et théoricien du cosmpolitisme. Nelly Andrikopoulou (1921-2014) a été peintre (voir ce numéro), première épouse de Nikos Engonopoulos et parmi les passagers du fameux Mataroa. Leurs lettres d’amour pendant l’occupation allemande en Grèce sont à l’ origine du documentaire tourné par le fils de Petros Timon Koulmasis et présenté au 19ème Festival de Salonique. Ce documentaire se penche aussi sur l’ histoire mal connue de l’Institut Scientifique Allemand d’Athènes, là où l’ emprise nazie n’ était pas visible à l’ époque. 
 
GrèceHebdo* a parlé avec Timon Koulmasis a propos de ce documentaire.  Nous comptons revenir sur l’ensemble de l’œuvre de l’auteur.
 

Est-ce que votre père vous parlait de la période de l’occupation allemande?

Mon père parlait rarement de l’occupation allemande de la Grèce qui l’avait mis devant un conflit d’identité insoluble. Il appartenait aux deux cultures et était de ce fait suspect aux uns et aux autres. Et les Grecs et les Allemands l’avaient mis en prison sans raison aucune. De l’autre côté, sa vie avec Nelly à Athènes, avec Fahrner et les étudiants à l’Institut Scientifique Allemand d’Athènes a été pour lui une époque personnellement et intellectuellement très stimulante. Mais beaucoup de souvenirs ont été enterrés.

Comment a  géré votre père son oscillation  identitaire entre la Grèce et l’Allemagne?  

Mon père s’est toujours défini comme cosmopolite. Des identifications nationales lui ont été étrangères – certainement aussi en raison de ses expériences traumatiques pendant la guerre. Il ne s’est pas rendu en Grèce pendant trente ans bien que son épouse (de son deuxième mariage) – ma mère – fût grecque. Ils partaient d’Allemagne et voyageaient partout dans le monde.

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Qu’est-ce que Nelly Andrikopoulou vous a appris tant par rapport  à votre père que par rapport à la conjoncture de l’occupation allemande?

Nelly était la seule survivante à avoir étudié à l’Institut Scientifique Allemand d’Athènes. Ses récits sont des témoignages très importants qui contribuent à éclairer ce chapitre mal connu de l’occupation allemande de la Grèce.

Quant à mon père, ce sont plutôt ses lettres (que Nelly m’a confiées), qui m’ont permis d’approfondir mes connaissances. Elles découvrent, en filigrane, un panorama extraordinaire du quotidien vécu par les deux jeunes gens et leurs amis sous l’occupation allemande. Puis, mon père devant se rendre en Allemagne à la fin de la guerre, elles décrivent, au sens littéral du terme, la fin de leur monde.

On découvre grâce à votre documentaire des images de l’occupation allemande jamais vues auparavant? Quelle est l’ origine de ces images?

Dans Portrait du père en temps de guerre, j’ai monté des images inédites de l’Occupation allemande de la Grèce, filmées par des soldats allemands. Je les ai trouvées après des mois de recherches chez des collectionneurs privés en Allemagne. Dans les mêmes endroits, au même moment historique, elle ne montrent pas les mêmes choses, ou de manière très différente, que, par exemple, les images saisissantes qu’a filmées Angelos Papathanassiou au risque de sa vie entre 1941 et 1944, les seules images que nous connaissions. C’est le rapport entre les deux qui est intéressant.

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Vous optez souvent pour le langage du lyrisme et de l’élegie. Pourquoi ce choix ?

Je crois à une permanence des choses, un principe éthique si vous voulez. Je reflète cette beauté dans des images et des mots de la lumière. Cela vaut pour tous mes films.

Être grec et à la fois allemand signifie quoi pour vous?

Je ressens ma double culture comme une richesse. Je ne me pose jamais la question de l’appartenance nationale. En cela, je suis resté le père de mon fils. J’ai grandi en Allemagne comme fils de parents grecs et j’habite en France…

* Interview accordée à Costas Mavroidis

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