Ioànna Bourazopoùlou (Prix «Athens Prize for Literature» de la revue Dekata) est née en 1968 à Athènes. Après des études de gestion hôtelière en Grèce et en Angleterre, elle est entrée à l’École Nationale d’Administration grecque. Aujourd’hui elle travaille auprès du ministère de la Santé.
Elle a publié les romans:
– Le boudoir de Nadir (2003, Kastaniotis)
– L’eau secrète (2005, Kastaniotis)
– Qu’a-t-elle vu, la femme de Loth? (2007, Kastaniotis) (traduit en français,
Gingko)
– La Vallée de boue (première partie de la trilogie «Le dragon de Prespe») (2014, Kastaniotis).Le roman «Qu’a-t-elle vu, la femme de Loth?» a été classé par Guardian parmi les meilleurs livres de science-fiction pour l’année 2013. Ioànna Bourazopoùlou parle à GrèceHebdo *
Fiction, fable gothique, thriller politique, récit grotesque, drame existentiel. Voilà certains termes utilisés pour caractériser votre œuvre. Au bout du compte, quel est l’élément unificateur qui traverse l’ensemble de votre œuvre? Peut-on parler d’un univers philosophique commun comme trait d’union?
Vous avez raison, je mélange différents genres littéraires-à ajouter à tout cela que vous avez mentionné le noir, la science- fiction, la forme théâtrale -pour aborder des questions existentielles ou politiques. Je cherche par ce mélange d’éviter à devenir lourde ou dépressive moi-même.
Un parcours logique en ce qui concerne l’évolution de mon raisonnement philosophique est sans doute visible dans mes livres, je ne sais pas, je l’espère bien. Mais j’ai plutôt le sentiment que chaque nouveau livre émerge des lacunes et des échecs du précédent, pour dire ce qui n’a pas été dit, pour mettre en évidence ce qui a été ignoré et pour corriger ce qui a été mal fait. En partant de mes omissions comme source d’inspiration, je me tourne vers un nouveau livre pour établir l’équilibre raté au cours de mon livre précédent. Cela produit bien évidemment un nouveau déséquilibre et donc la nécessité pour un nouveau livre.
Le quotidien Guardian met votre “Femme de Loth” parmi les livres de science fiction les plus importants pour l’année 2013.
Fiction, science fiction, je ne sais pas. En tout cas, l’imagination galopante voire illimitée joue un rôle prépondérant pour ce qui est de mon écriture et des satisfactions qui en découlent. Αu début c’est la réalité familière et ses divers éléments politiques et sociaux qui guident ma démarche mais à la fin ce qui en résulte se situe aux limites de la farce. C’est le règne de l’art du grotesque à savoir la déformation délibérée et l’excès qui accompagnent la liberté du rêve et de la fable.
L’Europe comme tradition et comme réalité sociopolitique occupe une place centrale dans vos livres. Parlez-nous de ce choix.
L’Europe y est souvent présente. Je me déplace tantôt vers la peninsule balkanique tantôt vers l’Afrique du Nord et tous ces déplacements témoignent d’une difficulté de situer avec précision ma patrie. «C’est quoi notre patrie?» pour se souvenir du poème qu’on apprenait lorsqu’ on était petits à l’école. Cette demande se multiplie pour moi au cours de ces dernières années.
Vous pouvez nous parler de votre dernier livre «La vallée de la boue» ainsi que de vos rapports avec la France?
Tout d’abord, il est à noter que j’ai reçu avec 16 auteurs Grecs une bourse par le Centre National Français du Livreen signe de solidarité à notre pays frappé par la crise. Grâce à la générosité de nos amis français, j’ai pu financer la recherche exigée pour mon dernier roman (ma démarche la plus ambitieuse jusqu’à aujourd’hui). «La vallée de la boue » fait partie de la trilogie «Le dragon de Prespe» (lac au nord de la Grèce partagée aussi par l’ Ancien République Yougoslave de Macédoine et l’Albanie). Ιci un dragon au visage fabuleux et capable de commettre des crimes arrive à changer le destin des trois pays qui partagent le lac.
* Entretien accordé à Magdalini Varoucha
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