Une exposition sur l’histoire diplomatique de la Grèce après la déclaration de son indépendance en 1830 est organisée par le département des Archives diplomatiques et historiques du ministère hellénique des Affaires étrangères, dans le cadre de la célébration du Bicentenaire depuis le début de la Révolution grecque. L’exposition, disponible en ligne, révèle d’importants documents officiels concernant la reconnaissance de l’État grec par les États existants de l’époque, soulignant les efforts du nouvel État afin de consolider sa position dans la communauté internationale. Selon le directeur des archives diplomatiques et historiques du Ministère, Georgios Polydorakis, « les victoires militaires n’étaient pas suffisantes pour l’indépendance. La reconnaissance par les autres États et l’établissement de relations diplomatiques et consulaires avec eux, étaient des conditions préalables pour que la Grèce devienne véritablement indépendante ».
À travers des documents historiques, l’exposition dévoile l’établissement des relations diplomatiques et consulaires ainsi que la mise en place d’un réseau consulaire présentant quelques détails intéressants des premiers pas de l’État grec, après la lutte grecque pour l’indépendance qui a commencé en 1821.
Haïti, premier pays à reconnaitre la Révolution grecque
Bien que les grandes puissances de l’époque (Grande Bretagne, France et Russie) aient été les premières à reconnaître le statut d’autonomie de la Grèce en signant le traité de Londres en juillet 1827, le petit État des Caraïbes d’Haïti a été le premier État indépendant à reconnaître la Révolution grecque en 1822. Le président d’Haïti Jean-Pierre Boyer a répondu à une lettre datée du 20 août 1821 de la direction du Comité grec de Paris et signée par Korais, Polychroniades, Bogoridis et Klonaris, exprimait l’enthousiasme du peuple haïtien pour le déclenchement de la Révolution. Bien qu’il ait déclaré l’incapacité de son pays à aider financièrement la lutte grecque, Boyer a souhaité aux Grecs des victoires similaires à celles des batailles de Marathon et de Salamine. Cette lettre a été publiée dans le quatrième volume du livre de Ioannis Philemon « Essai historique sur la révolution grecque » (1861). L’Ordre des Chevaliers de l’Hôpital de Saint-Jean de Jérusalem a été le suivant à reconnaître la Révolution grecque, tout en nommant un représentant à l’Administration provisoire de la Grèce dès 1823.
Les premières relations diplomatiques officielles avec des États indépendants ont commencé en 1830 quand la Grèce fut officiellement reconnue comme un État indépendant et souverain avec la signature du troisième Protocole de Londres le 3 février 1830. Il convient de noter cependant que le poste du ministre des Affaires étrangères a été créé pour la première fois par la première Constitution grecque, la Constitution d’Épidaure et la création de l’Administration provisoire de la Grèce aux débuts de 1822. C’est dans cette époque-là que Theodoros Negris (1790-1824), en tant que le premier ministre des Affaires étrangères du gouvernement provisoire de la Grèce, avait invité les représentants consulaires et diplomatiques des gouvernements étrangers situés dans les territoires grecs libérés à être accrédités auprès du gouvernement grec en 1822, un an après le début de la guerre d’indépendance grecque.
Le parcours vers la reconnaissance de l’état grec : de l’autonomie à l’indépendance
En 1827, les trois Grandes Puissances de l’époque – la Grande Bretagne, la France et la Russie – ont entamé des négociations sur un traité visant à rétablir la paix entre la Grèce et l’empire ottomane. Le traité de Londres, signé le 6 juillet de la même année prévoyait une médiation des trois signataires pour faire cesser les hostilités, préconisait un armistice immédiat en prévoyant la création d’un État grec en tant que «dépendant de la Turquie». Accepté par la Grèce, mais refusé par la Sublime Porte, le traité de 1827 a mené à la bataille navale de Navarin, le 20 octobre 1827, où la flotte alliée obtint une victoire décisive contre l’armada ottomane-égyptienne.
De même, depuis le 3 avril 1827, la troisième Assemblée nationale grecque (inscrite dans la série d’assemblées proto-parlementaires des Grecs révoltés) a créé la fonction de Gouverneur de la Grèce pour présider l’exécutif et a désigné Ioannis Kapodistrias (1776-1831) en tant que kivernitis (gouverneur), du jeune État grec indépendant. Kapodistrias était probablement le Grec le plus éminent de l’époque, ancien Ministre des affaires étrangères de la Russie, une personne ayant de grandes compétences diplomatiques ainsi que des liens internationaux.
La reconnaissance de facto du gouvernement de Kapodistrias comme gouvernement légitime de l’État grec autonome a lieu avec l’arrivée à Poros des trois Ambassadeurs des Grandes Puissances accrédités à Constantinople en septembre 1828 et, de plus, avec l’accréditation des Ministres résidents immédiatement après.
Cependant, le premier acte international officiel reconnaissant la Grèce comme un État entièrement indépendant est le troisième Protocole de Londres signé le 3 février 1830. Dans le premier de ses 11 articles, il est proclamé que «la Grèce formera un État indépendant et jouira de tous les droits politiques, administratifs et commerciaux attachés à l’indépendance totale». Les frontières du pays furent alors déterminées via la ligne Aspropotamos–Spercheios allant de l’embouchure du fleuve Aspropotamos (ou Achéloos) au fleuve Spercheios qui se jette dans le golfe Maliaque.
L’ exposition en question présente des documents concernant les relations diplomatiques de l’État grec pour une période allant approximativement jusqu’en 1840 alors que les États sont mentionnés par le nom qu’ils portaient à l’époque. Parmi eux on distingue le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande, la Russie, la France, la Belgique et les États-Unis mais aussi le royaume des Deux-Siciles, la Sardaigne, le Royaume de Suède et de Norvège, les États de la Confédération allemande, la Perse etc. Parmi les documents exposés, on trouve aussi des témoins des relations avec les États non indépendants et les régions de cette époque comme les Principautés de Moldavie et de Valachie, la Principauté de Serbie, la Principauté de Samos ou les États-Unis des îles Ioniennes.
Tous les documents proviennent des archives diplomatiques et historiques du ministère des Affaires étrangères, sauf indication contraire, et sont numérisés et affichés sur la plate-forme numérique du service des archives diplomatiques et historiques arxeio.mfa.gr, sur laquelle l’ensemble de la collection d’archives du Service central du ministère des Affaires étrangères jusqu’en 1924 est disponible en format numérisé.
Visitez l’exposition du Service des archives diplomatiques et historiques du ministère hellénique des Affaires étrangères « La Grèce libérée » ici : https://200years.mfa.gr/en/