La musique rejoint la peinture. Le visiteur de l’éxposition « Rébétiko » a l’occasion de connaître 125 œuvres faites par 50 artistes grecs, tels que Alekos Fassianos, Yannis Tsarouchis et Tassos, pour ne citer qu’ eux. Point commun de ses oeuvres, l’inspiration par le genre musical le plus emblématique de la Grèce moderne, à savoir le Rebetico. L’exposition, organisée par l’agence culturelle de la ville d’Athènes (OPANDA), aura lieu dans trois d’espaces culturels de la ville, à savoir la Pinacothèque municipale d’Athènes, le Centre des arts municipal et le théâtre musical Olympia.

Cacao Rocks, Rébétiko. Source : OPANDA

L’exposition comprend des peintures, des gravures contemporaines, des vidéos, des photographies, des installations sonores, des performances et des livres présentés comme œuvres d’art.

Il s’agit d’une exposition d’art contemporain sur l’amour et la fuite, deux notions qui, parmi d’ autres, caractérisent le rébétiko «  ce grand évènement cultuel de la Grèce moderne », aux mots du compositeur Nikos Mamangakis.

Les racines du rébétiko

Le Rébétiko est essentiellement un terme générique, comprenant plusieurs formes de musique qui ont évolué en Grèce et dans les parties grecques de l’Empire Ottoman au milieu et à la fin du XIXe siècle, donnant suite au début du XXe siècle au son distinctif du rébétiko qu’on connait aujourd’hui.

Πάνος Κουτρουμπούσης Από μπουζούκια σε μπουζούκια 1962 film still 2
Panos Koutroubousis, De bouzoukia à bouzoukia ; photographie de plateau, 1963. Source : OPANDA

Le rébétiko commence « οfficiellement » dans les années ’30 au port du Pirée, comme fruit de plusieurs « ruisseaux» de musique, tels que la sérénade ionienne et puis athénienne, la valse-tango de Smyrne sans pour autant meconnaître le jazz constituant l’un de ces petits ruisseaux au même titre que l’opérette grecque. En 1922, c’est la « Catastrophe de l’Asie Mineure » et l’arrivée forcée de plus d’un million de réfugiés vers l’espace helladique (Ferris) qui a donné de l’élan au genre. Le rébétiko est largement basé sur la tradition orale et a été décrit comme le « blues urbain grec ». En décembre 2017, le rébétiko est inscrit sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité créée par l’UNESCO.

Réflexions contemporaines sur le rébétiko

Lorsqu’on entend parler de rébétiko et d’arts visuels, on pense souvent aux dessins d’Alekos Fassianos pour les livres d’Elia Petropoulos, aux gravures de Tassos pour les couvertures des disques de Sotiria Bellou ou aux danseurs de zeibekiko de Yannis Tsarouchis.

τσαρούχης τάσσος

À gauche : Yannis Tsarouchis, Soldat dansant du zeibekiko ; Source Nikias. À droite : Couvertures des disques de Sotiria Bellou par Tassos ; Source kalliteralamia.gr.

L’éxposition « Rébétiko » enrichit cette iconologie en changeant la représentation visuelle du rébétiko de manière radicale. Elle explore le lien qui unit l’art contemporain au rébétiko et la manière avec laquelle il est approché et interprété par des artistes contemporains. On examine comment un artiste contemporain peut-il rendre en image des verses qui, selon le grand folkloriste grec, Elia Petropoulos, sont les « chansons des âmes blésées, simples, pures et sensuelles de Grèce ».

La plupart des œuvres ont étés commandées par la ville d’Athènes en vue de l’exposition. Les œuvres démontrent des convergences, des similarités et même des motifs communs, comme par exemple « la chaise » qu’apparait dans plusieurs d’eux. Quelques artistes ont saisi l’opportunité afin de s’approcher de leurs grands maîtres de la peinture tandis que quelques autres ont exploré des liens personnels et des histoires familiales avec leurs objets d’inspiration. Tel est le cas de l’œuvre de Yannis Theodoropoulos inspiré par Pikinos, un proche de l’artiste qui a été poignardé à mort en 1931 à Thissío et dont la mort a aussi inspiré le rébète Kostas Roukounas à écrire la chanson « Pikinos ».

Le catalogue bilingue (grec et anglais) de l’exposition inclut des textes par des artistes participants, des écrivains invités et des érudits du rébétiko. Tous les textes se concentrent sur la pertinence contemporaine du rébétiko.

Κώστας Τσώλης ΑΠΑΓΟΡΕΥΟΝΤΑΙΤΑΣΠΑΣΙΜΑΤΑ 2016 ακρυλικό σε καμβά 50x100cm
Kostas Tsoclis, Défense de casser la vaisselle, 2016 ; Source : OPANDA

Comme l’a remarqué avec justesse Jacques Lacarrière dans son Dictionnaire amoureux de la Grèce, même si les rébétika défient la traduction ; lorsque ils parlent de prison, d’amour, de solitude, d’exile, de jalousie, de trahison ou de migration deviennent-ils universels.

Dans un geste symbolique, les commissaires de l’exposition ont choisi à exposer des objets personnels et des couvertures des disques de Sotiria Bellou,chanteuse emblematique du Rebetico côte à côte avec des photographes et des objets personnels de Maria Callas. La juxtaposition de ces deux figures prépondérantes de la musique du XXe siècle fait allusion à la fameuse affirmation de Yannis Tsarouchis : « J’aime Callas et Sotiria Bellou. Et je ne me sens pas divisé. Même ceux qui se voient scandalisés, il doivent saisir les raisons de cet amour commun  ».

INFOS PRATIQUES

Durée : 10 février –3 Avril 2022
Lieux : Pinacothèque municipale d’Athènes, Leonidou & Myllerou, Place Avdi
Centre des arts municipal d’Athènes, Vassilissis Sofias, Parko Eleftherias
Olympia – Théâtre musical municipal « Maria Callas », Akadimias 59
Horaires : mardi – vendredi 11:00 – 19:00 ; samedi – dimanche 10:00 – 15:00 ; lundi fermé.
Entrée libre

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L.S

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