Connu pour ses créations publiques monumentales en France, l’artiste-sculpteur Philolaos Tloupas (1923-2010) est à l’honneur dans sa ville natale en Grèce lors d’une exposition jusqu’à la fin janvier 2025. Occasion de revisiter la vie et l’œuvre de ce créateur pluridisciplinaire qui a partagé sa vie entre la Grèce et la France.

“Je veux que mes sculptures existent dans la nature, dans la vie et dans la ville,
plutôt qu’enfermées dans les musées. Il faut que les gens puissent les
rencontrer, parce qu’elles ont été faites pour cela. […] Dehors elles respirent
mieux”

Philolaos Tloupas, source

Philolaos Tloupas, dit Philolaos, est né à Larissa le 4 mars 1923 de père menuisier-tourneur sur bois et d’un grand-père chaudronnier. Frère du photographe Takis Tloupas (1920-2003), dès son plus jeune âge, Philolaos s’est intéressé à la peinture et à la sculpture et s’est engagé dans la construction en aidant son père dans l’entreprise familiale de fabrication de meubles.

En 1945, il est admis au Département de Sculpture de l’École des Beaux-Arts d’Athènes mais, et en 1949 il poursuit ses études à l’École des Beaux-Arts d’Athènes auprès de Michael Tombros. Sa rencontre avec l’artiste grec Athanase Apartis, ancien élève d’Antoine Bourdelle, l’affranchit de l’enseignement de Tombros. Grâce à son influence, Philolaos découvre qu’une autre sculpture est possible par le biais de l’art cycladique (-3200 à – 2000 av J-C.) dont il apprécie les proportions équilibrées et la simplicité des lignes.

En juin 1950, Philolaos est diplômé. Mais sa précarité financière et la fragilité politique et économique de la Grèce l’inquiètent. Apartis, conscient de l’engagement artistique de Philolaos, lui conseille d’aller à Paris s’il veut développer sa recherche sculpturale. Philolaos s’y installe en octobre 1950 où il suit des cours à l’atelier de Marcel Gimond à l’École des Beaux-Arts. Ses premières sculptures sont des bustes et des figures classiques, influencés par l’art grec antique, notamment les périodes archaïques et classiques.

En 1951, il poursuit ses études en céramique au Centre de Claireau à Saint-Rémy-lès-Chevreuse et commence également à enseigner..

Par la suite, il abandonne la production de formes réalistes pour de sculptures abstraites. Depuis 1953, Philolaos commence à s’expérimenter avec divers matériaux tels que la pierre, le bois, le plomb et le fer, mais principalement l’acier inoxydable en raison de sa flexibilité.

Au début des années 1960, il travaille avec de nombreux architectes (André Gomis, Pierre Parat, Michel Andrault, Badani) et paysagistes (Jacques Simon), qui lui permettent d’introduire ses sculptures monumentales en métal et en béton lavé à l’intérieur de leurs projets architecturaux et paysagers pour des espaces publics en France. En parallèle, Philolaos réalise de nombreuses commandes de sculptures en acier inoxydable à Lyon, Créteil, Évry, mais aussi en Grèce dans sa ville natale et à Thessalonique.

Les réservoirs d’eau de 57 m de haut de la ville de Valence, son imposante œuvre réalisée entre 1963-1971 en collaboration avec l’architecte André Gomis, a été considérée comme la meilleure sculpture environnementale extérieure des années 1970-80 et a remporté le 1er prix de la meilleure sculpture de France en 1981 ainsi que la Médaille des Arts Plastiques de l’Académie d’Architecture de France.

En collaboration avec l’architecte François Prieur, il conçoit en 1992 un parc de sculptures en banlieue parisienne. En 2005, le gouvernement français l’a honoré pour l’ensemble de son œuvre, le déclarant « Officier de l’Ordre des Arts et des Lettres ». Dans sa ville natale, Larissa, il a été honoré en 2009 par le TEE K.D. de Thessalie avec le soutien de l’Ambassade de France à Athènes.

En plus de son implication dans les sculptures monumentales, depuis 1970, il commence à créer des formes sculpturales organiques, ainsi que des animaux, des meubles et des objets surréalistes, des peintures en relief en bois échoués et tournés et des bijoux pour des pièces de théâtre classiques.

A mentionner le gigantesque Oiseau Mécanique en inox (10 x 6 mètres), réalisé en 1972, qui est la première sculpture à intégrer le quartier de La Défense à Paris, qui devient à cette période une plateforme expérimentale pour les artistes contemporains.

En parallèle, il entreprend la conception et construction des espaces ouvertes et expose son œuvre lors d’expositions personnelles dans des lieux d’art tels que la galerie Argos (1964) à Nantes, la Galerie A (1964) à Paris, la galerie Merlin (1964) à Athènes, la galerie Schneider (1966) à Rome, la galerie 427 Lovett Blvd (1988) à Houston et le Musée de Valence (1991), et a participé à de nombreuses expositions collectives dans des musées et des institutions artistiques, notamment au Petit Palais (1953), au Musée d’Art Moderne (1962) et au Centre Pompidou (1982) à Paris, ainsi qu’à la Pinacothèque Nationale d’Athènes-Musée Alexandros Soutsos (1992) à Athènes. Il a également participé à des institutions internationales telles que la Biennale d’Anvers (1953), le Salon de Mai (1954-1981) et le Salon de la Jeune Sculpture (1958-1967) à Paris, la São Paulo Biennial (1965) et bien d’autres.

Philolaos meurt le 18 septembre 2010  à Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Yvelines, France) ou se trouve aussi sa  maison -atelier, très imprégnée de son univers artistique.

Photo d’introduction: Philolaos, photo par Takis Tloupas. Source: “Philolaos”, documentaire par Kalliopi Legaki, 2023

GRECEHEBDO | Takis Tloupas, « Les photographies d’une vie » : 100 ans de sa naissance
GRECEHEBDO | Les premières photographies couleur de la Grèce, une histoire française: les Archives de la Planète d’Albert Kahn (1913-1927)
GRECEHEBDO | La genèse de la photographie en Grèce: une histoire plutôt greco-française
GRECEHEBDO | Fred Boissonnas et l’image de la Grèce: la photographie comme mécanisme de propagande
GRECEHEBDO | Victor Bérard et Frédéric Boissonnas sur les traces d’Ulysse: du mythe à la photographie
GRECEHEBDO | les sites grecs classés patrimoine mondial de l’UNESCO: Le Mont Athos (1988)
GRECEHEBDO | Mont Athos | une Sainte Montagne pour la Vierge Marie, un royaume des hommes et une histoire des femmes «interdites»

M.V.

TAGS: arts | Culture | France | Grèce | histoire | peinture