Poète, romancier, dramaturge et dessinateur Nanos Valaoritis est mort le 13 septembre à Athènes. Né en 1921 à Lausanne, Valaoritis a vécu en Grèce, au Royaume-Uni, en France mais aussi aux États-Unis.
Valaoritis a grandi en Grèce où il a étudié les classiques et le droit à l’université d’Athènes. Il écrivait aussi de la poésie et, en 1939, il se vit publié dans les pages de la revue Nea Grammata, aux côtés d’Odysseas Elytis et de George Seferis, et fut immédiatement intégré à leur cercle littéraire. En 1944, Nanos Valaoritis s’échappa de la Grèce occupée par les Allemands, traversa la mer Égée et se dirigea ensuite vers le Moyen-Orient et l’Égypte, où il prit contact avec Seferis. A l’instigation de Seferis, il se rend par la suite à Londres. Il y a rencontré T. S. Eliot et il a travaillé pour Louis MacNeice à la BBC. Parallèlement à ses études en littérature anglaise à l’Université de Londres, il a traduit des poètes grecs, parmi lesquels Elytis et Embirikos. Son premier recueil de poèmes, ‘’Le Châtiment des sorciers’’, orné de décorations de John Craxton, a été publié à Londres en 1947.
En 1954, Nanos Valaoritis s’installe à Paris (jusqu’en 1960) où il rencontre et fréquente le groupe surréaliste et André Breton. Il poursuit ses études à l’École des Hautes Études. À la Sorbonne il s’occupe particulièrement de la philologie mycénienne. Pendant cette période, Valaoritis écrit deux pièces de théâtre en français : La Bûche et L’Hôtel de la nuit qui tombe. Ses amis de l’époque, sont Elisa et André Breton, Manina et Alain Jouffroy, Wolfgang Paalen, Robert Benayoun, Toyen, Nikos Gatsos, Georges Makris et Andréas Embirikos.
Valaoritis avait décrit sa connaissance avec André Breton dans une interview accordée à GrèceHebdo en juillet 2016. “J’ai fait sa connaissance en 1954 dans un vernissage d’une petite galerie qui s’appelait «L’Etoile Céleste» près du boulevard Saint Germain. Je les ai tous connus, ce groupe de l’époque ainsi que deux anciens, à savoir Benjamin Peret et Toyen. Les autres étaient des jeunes que je ne connaissais pas et qui étaient parmi les disciples d’ André Breton les plus récents. La raison pour laquelle je les ai rencontrés est parce que j’ai connu ma femme à cette époque, Marie Wilson une américaine qui était amie avec la femme de Breton Elisa.”
En 1960, Valaoritis revient en Grèce. En 1963, il édite la revue surréaliste Pali qui comptera six numéros de 1963 à 1967. Aux sommaires, les poètes surréalistes Grecs, Nanos Valaoritis, Andréas Embirikos, Nikos Engonopoulos, Tassos Dénegris, Nicolas Calas, Georges Makris, Dimitri Poulikakos, Costas Taktsis, Nikos Stangos… Mais également des poètes et auteurs étrangers traduits et présentés pour la première fois, comme André Breton, Allen Ginsberg, Samuel Beckett ou Octavio Paz.
Valaoritis demeure en Grèce jusqu’au coup d’État des colonels, en avril 1967. En 1967, Nanos Valaoritis émigre aux États-Unis, où il enseigne la littérature comparée et la théorie de l’écriture à Berkeley.
A propos de Nanos Valaoritis, Jacques Lacarrière avait affirmé: ‘’ Il y a bien des façons d’être grec aujourd’hui et même d’être poète grec. Dans la vie nomade, planétaire, qui l’a porté à vivre depuis des années entre la Grèce, la France et les États-Unis, Nanos Valaoritis a parcouru maints chemins de la création, restitués dans une œuvre forte et foisonnante, déconcertante quelquefois, provocante très souvent, mais qui depuis qu’elle se manifeste constitue l’une des voix et l’une des voies les plus originales de la Grèce d’aujourd’hui. Nanos Valaoritis a baigné au cœur du mouvement surréaliste, mais un surréalisme qui au contact du monde et des cultures mutantes de l’après-guerre se serait enfin libéré des maladies infantiles de l’avant-guerre pour atteindre ici un seuil de non-retour et devenir, dans son œuvre, ce miel acide, cette flamme fuligineuse, cette source sulfureuse, bref un mélange poétique détonnant où se côtoieraient dans la complicité des métaphores les ombres d’Orphée, de Blake, de Charles Fourier, d’André Breton, et de quelques autres, bien sûr, invités aux rencontres et aux noces de la Grèce dionysiaque et de l’Europe futuriste.’’
Le monde poétique de Nanos Valaoritis est, selon Lacarrière, un monde diffracté par rapport au monde naturel. Une fois plongés dans la substance de son langage, les mots cessent d’avoir un sens rectiligne et y acquièrent une forte oblicité, souligne Lacarrière. Dans sa propre perspective surréaliste, Valaoritis incorpore le mélange des styles , la parodie et l’ absurdité alors que l’ expérimentation de la forme littéraire reste toujours au centre de ses préoccupations.
A relire sur Grèce Hebdo
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