Sauvage, rocheuse, mystérieuse, l’île d’Hydra, un des centres de la guerre d’indépendance grecque et des grands armateurs, n’a jamais arrêté d’inspirer les artistes, qui l’ont choisi comme résidence principale ou secondaire. Elle n’a pas les grandes belles plages des autres îles, mais seulement une simplicité extrême du paysage -la mer, le rocher et les hommes- qui permet une introspection profonde, un jeu continu avec la vérité de la vie, les sens et les sentiments.
Plusieurs peintres ont habité Hydra, comme Nikos Hatzikiriakos-Gikas, originaire même de cette île, Panagiotis Tsetis, ou Konstantinos Vizantios, qui y a créé en 1936 une annexe de l’École des Beaux-arts d’Athènes. Pablo Picasso et Marc Chagall l’ont aussi visité et ont exprimé leur admiration pour ce paysage aux lignes fortes et claires. Les poètes et les écrivains, comme Giorgos Seferis, Odysseas Elytis ou Nikos Eggonopoulos ont trouvé là leur source d’inspiration, tout comme l’américain Henry Miller et les australiens George Johnson et Charmian Clift. Les peintres Anthony Kingsmil, Brice Marden et Peter Nolan et l’écrivain norvégien Axel Gensen y ont également réalisé de longs séjours.
Après le grand succès du film « Ombres sous la mer (Boy on a Dolphin) » en 1957 avec au rôle principale l’actrice italienne Sophia Lauren, plusieurs autres films y ont été tourné, comme la « La Fille en noir » de Michael Cacoyannis et « Phaedra » de Jules Dassin en 1962 avec Mélina Mercouri et Anthony Perkins.
Cet environnement cosmopolite, intellectuel et artistique constitue jusqu’à nos jours l’élément essentiel de l’île, attirant chaque année plusieurs personnalités internationales. Il existe pourtant une personnalité qui nous touche plus que les autres, parce que ses mélodies n’ont jamais cessé d’inspirer plusieurs générations à travers le monde, pendant plus de cinquante ans. Il s’agit de Leonard Cohen qui, au début de sa carrière, trouve refuge à Hydra, où il a encore une maison qu’il visite régulièrement.
En 1960, à l’âge de 26 ans, comme Leonard Cohen l’a raconté dans une interview, il marchait sur la Bank Street de Londres. C’était un jour pluvieux, condition caractéristique de la capitale britannique, quand Leonard Cohen aperçoit la « banque de Grèce ». Il entre et il va directement voir le guichetier, qu’il voit déjà bronzé. « Quel temps fait-il en Grèce » lui demande-t-il. « C’est le printemps » répond le guichetier. « Deux jours après je partais pour la Grèce » a-t-il avoué.
Après un court séjour à Athènes il est parti pour Hydra, où il est tout de suite tombé amoureux de son charme. Il achète une maison pour 1500 dollars et il y reste pour plus de 7 ans, écrivant ses premières chansons et y trouvant sa muse pour les dix ans à venir, la norvégienne, Marianne Ihlen. A Hydra, il écrit pour elle deux de ses plus grands succès, le « So Long, Marianne » et le « Bird on the Wire ». Leonard Cohen, ce grand poète, romancier et musicien passera ses années les plus heureuses a Hydra, et il y retournera à plusieurs reprises tout au long de sa vie. Même son fils a fait certains tournages dans leur maison à Hydra pour un de ses derniers clips.
Leonard Cohen se réveillait tous les jours vers 7 heures du matin et il travaillait jusqu’à midi, quand la chaleur d’été rendait difficile tout mouvement du corps et de l’esprit. Comme il a confessé dans une lettre à sa mère, « Je me lève tous les jours à sept heures et je travaille jusqu’à midi. Tôt le matin, il fait plus frais et c’est donc mieux, mais d’ailleurs j’aime aussi la chaleur, surtout quand je pense que la mer Egée est à seulement dix minutes de ma porte ».