A quelques heures de l’ouverture de la 58éme édition du Festival International du Film de Thessalonique (TIFF) qui aura lieu du 2 au 12 novembre, Orestis Andreadakis, directeur du TIFF depuis mai 2016, parle* du programme et des ambitions de la plus grande fête du cinéma en Grèce.

Né à Héraklion, en Crète, en 1963, Andreadakis étudie le cinéma à Athènes et par la suite la littérature française, l’histoire de l’art et la théorie du cinéma en France et en Suisse. Il a travaillé comme critique de cinéma pour un bon nombre de journaux et chaînes télé, et a été rédacteur en chef de la revue Cinéma de 2007 à 2016.

Andreadakis  évoque les éléments qui font du Festival international du film de Thessalonique une expérience cinématographique unique. Interrogé sur les effets de la crise sur la production cinématographique, il  souligne que cette crise est à l’ origine d’une nouvelle génération de cinéastes et d’artistes talentueux qui font preuve d’une œuvre originale voire innovante.

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Quelle est votre vision pour le Festival international du film de Thessalonique ?

Ma vision comprend trois points centraux: Dans un premier temps, engager le plus grand nombre de personnes possibles et d’institutions de Thessalonique autour du festival afin que ceci  fasse partie intégrante de la ville, non seulement au cours des mois du festival à savoir en novembre et mars, mais tout au long de l’année, à travers des activités et des programmes éducatifs présents dans les salles de cinéma et le seul musée du cinéma en Grèce qui est le Musée du Cinéma de Thessalonique.

Dans un deuxième temps, on vise à renforcer le poids de l’industrie cinématographique grecque, en montrant autant de films grecs que possible et en mettant en contact les équipes des auteurs avec des invités du marché global afin de fonder un terrain fertile ouvert au dialogue entre les cinéastes grecs et leurs homologues étrangers. Ce que nous cherchons à faire est d’aider les cinéastes à trouver des futurs collaborateurs et en même temps, à encourager la diffusion de films grecs dans les cinémas et les chaînes de télévision du monde entier.

Dernier point, mais pas le moindre, nous souhaitons renforcer davantage l’identité artistique du TIFF, de manière à la rendre distincte par rapport à d’autres festivals européens de cinéma.

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Quel est l’objectif principal de la programmation du TIFF ?

Comme son titre l’indique, le Festival du film de Thessalonique a une vocation internationale. Nous projetons des films venus du monde entier et, au cours des années précédentes, nous avons présenté des films remarquables d’Amérique latine, d’Asie, de Russie, du Moyen-Orient. Nous projetons souvent des films  totalement inconnus au public. Ceux-ci nous permettent de découvrir de nouveaux mondes fascinants et prouvent que les gens du monde entier partagent les mêmes préoccupations, rêves et espoirs.

Quel a été l’effet de la crise économique sur la production cinématographique et la fréquentation des cinémas en Grèce ?

La crise économique a sérieusement affecté la production cinématographique, la distribution et la performance au box-office en Grèce et à l’étranger, mais d’autres moyens de distribution, comme Netflix, le téléchargement légal ou illégal, ont également joué leur propre rôle en influençant la fréquentation des salles. Force est pourtant de constater qu’une grande partie du public, en particulier les jeunes, s’intéressent au cinéma, ils regardent des films, mais ils le font surtout en restant chez eux, et non  pas en visitant les salles du cinéma. Malgré tout,  l’intérêt du public pour l’image-mouvement reste vif. C’est pourquoi je crois qu’un Festival de Film comme celui de Thessalonique doit renforcer une identité qui met en évidence une expérience cinématographique complète et ne se limite pas à la seule distribution des films. Autrement dit, les  festivaliers de Thessalonique ne devrait pas fréquenter pas les salles dans le seul but de regarder un film, mais afin de vivre toute l’ambiance tout au tour. Ainsi, au fil du Festival, nous proposons toujours des tables rondes, des classes de maître, des fêtes et d’autres événements qui contribuent à une expérience cinématographique unique.

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Les films grecs étaient souvent au passé taxés de mauvais scénarios. Toutefois,  au cours des années précédentes, les scénarios grecs ont remporté des prix prestigieux. La crise a-t-elle affecté les scénarios grecs ?

Je ne pense pas que le seul problème du cinéma grec résidait dans les mauvais scenarios. Un  scénario ne peut pas être bien jugé lorsqu’ on ne procède également  à la lecture de son texte. Ce que nous voyons à l’écran, c’est le produit final de la combinaison du dialogue, de la cinématographie, du théâtre, des décors de cinéma, des costumes etc. Dans le contexte de la crise, les cinéastes grecs étaient appelés à se pencher sur des sujets qui intéressent plus des gens ordinaires. Par ailleurs, ce qui joue un rôle-clé pour comprendre la qualité des scénarios primés, c’est que la nouvelle génération de cinéastes est hautement qualifiée, c’est-à-dire elle a beaucoup voyagé ou étudié à l’étranger et est plus ouverte aux influences internationales.

Les films grecs  trouvent leur chemin vers les festivals internationaux. Pourquoile public étranger s’ y intéresse ?

La crise économique a mis la Grèce sur le devant de la scène. Des questions ont vu le jour sur les reflets de la crise, non seulement dans le cinéma mais aussi dans les autres types de l’expression artistique. Par ailleurs, la crise nourrit  le  besoin d’expression des artistes et puisqu’ ceux sont très qualifiés, comme je l’ai déjà souligné, cela conduit à des produits artistiques très intéressants.

Y a-t-il quelque chose dont vous êtes particulièrement fier à l’heure actuelle ?

Oui, je suis très fier du capital humain du TIFF: cette équipe extraordinaire du Festival, avec ses connaissances et ses compétences impressionnantes, c’est la raison principale pour laquelle je suis fier d’être à la tête de ce festival.

*Entretien accordé à Greek News Agenda | Film Festival Director Orestis Andreadakis on creating an absolute cinematic experience Propos recueillis par Florentia Kiortsi. Traduction vers le français: Magdalini Varoucha.

INFOS
Le site du festival http://www2.filmfestival.gr/en/
port of thessaloniki lights
M.V.

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