Λυσίπονον*
 
L’année prochaine à Ithaque, me disaient alors
Tendrement en détournant leurs paroles mes amis
Que je voyais maintenant pour la dernière fois si j’en croyais
Leurs souhaits de se retrouver à Jérusalem
En laissant les anges blonds à Los Angeles
 
Parce que leurs amoureuses n’étaient pas de jeunes juives
Mais est-ce que ma grand-mère n’aurait pas réagi elle aussi
Me demanda de manière à ne pas être entendue cependant
La maman de la mère de Jonas, qui s’était échappée
Petite fille du ventre de la baleine
 
Tu sais bien, toi, me dit-t-elle avec un clin d’œil discret
Parce que tu m’as dit que la tienne est arrivée enfant chassée
D’Asie à Salonique quant votre ville était
Encore la Nouvelle Jérusalem et qu’elle a épousé un réfugié
De chez elle pour que fructifie leur rameau grec
 
Que faire nous qui nous sommes rescapés de tant en tant
On va devenir Los Angeliens si on ne se préserve pas
Que les enfants restent ici où règne la sécurité
Mais qu’ils disent l’année prochaine à Jérusalem
Et même si la mort doit ne plus m’oublier
 
Des milliers de vagues d’avions aux ailes rigides
Ont traversé depuis le ciel blanc et le noir
Sans laisser derrière eux la moindre marque
Alors que sur le sol de la lune où ils ont marché
Leurs traces seront retrouvées par ceux qui y retourneront
 
C’était la pleine lune hier au-moins là où la montagne
Cesse de décrire le pourtour de l’estrade
Où des étoiles pendent toutes mûres jusqu’au balcon
D’une maison solitaire dans la baie qui nous abrite,
Brodée depuis longtemps au cœur de l’île de Pénélope
 
* «qui dissout la peine». Inscription qui apparaît gravée sur le fronton d’un bâtiment en bord de mer à Ithaque et qui remonte au moins à Pindare. (Ndl’A)
 
 
Traduction © Marie-Laure Coulmin Koutsaftis, Anthologie: Ce que signifient les Ithaques, 20 poètes grecs contemporains, 2013]
Peinture: Maleas Konstantinos ” Cour du couvent St Jean le Baptiste, Jérusalem “
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