En collaboration avec le Musée Benaki, la Société des Historiens de l’Art Grecs (ΕΕΙΤ) invite Eric Michaud pour présenter une conférence, samedi 6 mai, à 11h30, sous le thème «Les invasions barbares et la naissance de l’histoire de l’art». Eric Michaud est le Directeur d’études à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (ΕHESS, Paris) et ses recherches portent sur les figures de l’homme nouveau qu’ont dessinées conjointement, au 19ème et au 20ème siècles, artistes, politiques et idéologues, ainsi que sur l’archéologie de ces représentations. Il a publié plusieurs ouvrages sur l’histoire de l’art dont ‘Les Invasions barbares. Une généalogie de l’histoire de l’art’ (Gallimard, 2015).

Eric Michaud (c) photo: Annik MH de Carufel | Le Devoir

L’histoire de l’art: une science orientée par la pensée raciale?

L’histoire de l’art qui s’est inscrite dans le grand récit de la guerre des races fera l’objet de sa conférence. Selon Michaud, vers 1800, les invasions de barbares sont devenues soudainement l’événement décisif par lequel l’Occident se serait engagé dans la modernité : le sang neuf des races du Nord, tout en conservant l’ancien, aurait apporté un art nouveau, nécessairement antiromain et anticlassique, et dont l’héritage était encore manifeste en Europe. Ce récit fantastique allait prendre une signification culturelle et politique nouvelle lorsque l’objet artistique serait sommé de dire l’identité, non pas de son créateur singulier mais du groupe ethnique – «peuple» ou «race» – dont il était supposé provenir. Les musées, pour finir, regroupèrent les productions des beaux-arts selon leur provenance géographique et l’appartenance «ethnique» de leurs créateurs.

Michaud Benaki affiche

Il serait parfaitement vain de chercher à démontrer que l’histoire de l’art fut une discipline raciste : elle ne l’aura été ni plus ni moins que les autres sciences sociales qui, toutes, furent touchées ou orientées par la pensée raciale visant à classer et hiérarchiser les hommes en fonction de traits somatiques et psychologiques qui leur étaient attribués. Mais, montre Éric Michaud, les liens qu’elle a tissés entre les hommes et leurs objets artistiques ne sont pas encore tranchés : l’opinion la plus commune sur l’art est qu’il incarne au mieux le génie des peuples. Aujourd’hui encore, sur le marché mondialisé, la provenance ethnico-raciale exhibée des œuvres – «Black», «African American», «Latino» ou «Native American» – donne à ces objets d’échange une plus-value estimable. Ainsi s’expose en permanence une concurrence des «races» qui n’est jamais que la même qui présida aux commencements de l’histoire de l’art.

Info pratique:
Samedi, 6 mai 2017 à 11h30, Musée Benaki, rue Pireos 138, Athènes
Entrée libre/ Conférence en français avec traduction simultanée en grec
 
 
 
 

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